Car les textes qui régissent le Pacte n’ont pas été modifiés et les consignes ministérielles et rectorales ne sont que des stratagèmes pour faire accepter l’inacceptable.
Lorsque le Pacte a été annoncé par le président Macron en avril 2023, il devait être le remède miracle au manque de professeurs et à l’absence de remplaçants. Souvenez-vous, aucune classe ne devait être sans enseignant à la rentrée 2023 : « Je veux qu’à la rentrée prochaine, on puisse remplacer du jour au lendemain les professeurs dans les classes, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui dans beaucoup de collèges et lycées. C’est une priorité » (interview donnée à TF1 et France 2 le 4
avril 2023).
Pour cela, il n’était pas question de recruter des professeurs mais de faire accepter à ceux qui étaient déjà surchargés de travail qu’en renonçant à leurs droits statutaires (limitation du nombre d’HSA, respect de l’emploi du temps, respect de la qualification), la promesse présidentielle serait exaucée.
La réalité fut tout autre. Massivement, avec le SNFOLC, les enseignants ont refusé de tomber dans ce piège grossier. Ils ont pris position pour faire savoir collectivement qu’ils refusaient ce dispositif qui menaçait aussi bien leur santé que leurs statuts. Malgré les multiples pressions et chantages du style « dépêchez-vous de prendre des Pactes car il n’y aura plus d’IMP ni d’HSE ! », les personnels ont résisté et les chefs d’établissement ont rendu aux rectorats la majorité des briques de Pacte. Le bilan du ministère fait état de moins de 30 % de briques de Pacte prises.
En cours d’année, restriction budgétaire oblige, le ministère a même ordonné de fermer le robinet. Il n’était plus possible de distribuer de nouvelles briques quand toutes les heures avaient été consommées…
A la rentrée 2024, du fait de la réforme du choc des savoirs et de la crise de recrutement, non seulement il n’y a pas assez d’enseignants pour en mettre un devant chaque classe dès la rentrée, mais un mois après la rentrée, des milliers d’élèves n’ont toujours pas eu cours de français, de mathématiques, etc.
Le ministère et les rectorats ont donc modifié leur communication sur le sujet et assoupli les conditions d’attributions pour tenter d’utiliser le Pacte à plein régime pour masquer le manque de professeurs.
Dans le même temps, en application des 700 millions d’euros de coupes budgétaires supplémentaires imposées par le gouvernement à l’Éducation nationale pour cette année 2024, les personnels ont pu constater dans de nombreuses académies et départements, dans de nombreux
établissements, une réduction des enveloppes du pacte accompagnée d’une réduction, voire d’une suppression des enveloppes de HSE.
Le Pacte RCD est présenté comme la priorité des priorités. Le ministère et les rectorats donnent de nouvelles consignes aux chefs d’établissement qui, lors de la prérentrée notamment, ont été chargés de présenter ces nouvelles règles comme une opportunité à saisir. Les Pactes RCD doivent d’abord être pris pour pouvoir distribuer ceux pour les autres missions, mais les parts de Pactes sont à nouveau sécables : on peut ne prendre que 9h et même passer de 18h à 9h en cours d’année si on le souhaite. La consigne est clairement de rassurer les collègues : le Pacte ne présenterait plus que des avantages et aucun danger.
Mais les risques demeurent les mêmes. Car les textes qui régissent le Pacte n’ont pas été modifiés et les consignes ministérielles et rectorales ne sont que des stratagèmes pour faire accepter l’inacceptable.
Le SNFOLC vous informe et vous défend
Questions / Réponses
LE PACTE RCD REMPLACE-T-IL LES HSE POUR RÉMUNÉRER LES REMPLACEMENTS DE COURTE DURÉE ?
NON
Car, même si l’enveloppe d’HSE a été réduite dans de nombreuses académies, aucun texte n’impose à un collègue d’accepter de s’engager pour 9h ou 18h de remplacement de courte durée, de dépasser ses obligations réglementaires de service, ni de se laisser imposer un remplacement de courte durée pour lequel il ne serait pas volontaire. En effet, le décret du n°2005-1035 du 26 août
2005 a été abrogé par le décret du 8 août 2023 (article 8) sur le Pacte, ce qui supprime désormais la possibilité d’imposer un RCD à un enseignant sauf s’il a signé le Pacte.
De plus, il faut savoir que chaque absence de courte durée d’un enseignant génère automatiquement des HSE de remplacement qui ne sont pas comprises dans l’enveloppe d’HSE allouée aux établissements.
Dans de nombreux établissements, on a tenté de faire accepter des Pactes RCD en invoquant le fait que pour économiser l’enveloppe d’HSE, il valait mieux se les faire rémunérer sous forme de Pacte, sans forcément préciser que l’engagement valait pour 9 ou 18h.
La solution n’a pas changé, c’est la réponse collective avec l’appui du syndicat qui permet de refuser les pressions et le chantage au Pacte. La situation du remplacement est telle que si vous refusez collectivement d’effectuer les remplacements de courte durée par le biais du Pacte, la direction sera bien obligée de rémunérer les RCD en HSE. C’est ce que le SNFOLC a obtenu dans de nombreux établissements.
DEPUIS LA RENTRÉE, SI J’ACCEPTE UN PACTE « AUTRES MISSIONS » JE NE RISQUE PAS DE ME VOIR IMPOSER D’ASSURER DES REMPLACEMENTS DE COURTE DURÉE.
FAUX
Sur consignes des rectorats les chefs d’établissement affirment disposer d’une enveloppe de Pactes pour le RCD et d’une autre enveloppe de Pactes pour les autres missions. Ce qui laisserait à penser que ces deux enveloppes sont distinctes et qu’en cas d’urgence on ne peut pas transformer votre Pacte « autre missions » en Pacte RCD et vous demander d’assurer le remplacement d’un de vos collègues. Or le décret du 8 août 2023 et la circulaire du 20 juillet 2023 n’ont pas été modifiés et continuent de s’appliquer. Ils prévoient notamment : « La lettre de mission est valable pour la durée de l’année scolaire. Elle peut être amendée en cours d’année à l’initiative de l’inspecteur de l’Education nationale, du chef d’établissement ou de l’agent. »
Autrement dit, le chef d’établissement peut vous promettre qu’il ne vous demandera rien d’autre que la mission pour laquelle vous avez signé un Pacte. Mais si la mission n’est plus jugée prioritaire, notamment en cas d’absences de professeurs impossibles à remplacer faute de remplaçants, il pourra, s’il l’estime nécessaire, changer la nature de votre mission. Finalement, il n’est pas tenu de
respecter sa part du contrat ! Le Pacte est donc un contrat qui n’engage qu’une seule des deux parties : l’enseignant.
Comment s’étonner qu’il y ait si peu de volontaires ?
SI JE VEUX RÉCUPÉRER UNE HEURE DE COURS AVEC MES ÉLÈVES SUR UN CRÉNEAU PENDANT LEQUEL ILS N’ONT PAS COURS, SUIS-JE SUIS OBLIGÉ(E) DE PRENDRE UN PACTE RCD?
NON!
La note de service du 20 juillet 2023 le précise : « S’agissant de la mission de remplacement de courte durée, une heure d’enseignement assurée postérieurement par un professeur en raison de son absence ne peut être décomptée au titre de l’engagement de 18 heures de la part fonctionnelle « Remplacement de courte durée » que si elle intervient durant une heure non assurée en raison de l’absence d’un autre professeur. À défaut, elle est rémunérée dans les conditions prévues par le décret n° 50-1253 modifié du 6 octobre 1950 fixant les taux de rémunération des heures supplémentaires d’enseignement effectuées par des personnels enseignants des établissements d’enseignement du second degré. »
Les HSE pour le remplacement de courte durée choisi par l’enseignant demeurent. Il est donc faux d’affirmer que tout RCD passe nécessairement par un Pacte.
LES OBLIGATIONS SONT-ELLES IDENTIQUES ENTRE « DEVOIRS FAITS » AVEC LE PACTE ET « DEVOIRS FAITS » PAYÉES EN HSE ?
NON!
La note de service du 20 juillet 2023 est très claire : le professeur signataire du Pacte « participe aux réunions de coordination de « Devoirs faits », à la composition des groupes et les fait évoluer en fonction des besoins des élèves ; assure le suivi des élèves et le lien avec les professeurs de la classe des élèves. En fin de mission, un bilan d’activité est remis au chef d’établissement. » Ces dispositions ne s’imposent pas à l’enseignant non signataire du Pacte.
Ainsi l’enseignant signataire du Pacte est tenu d’assurer des missions supplémentaires que l’enseignant non signataire pourra demander à se faire rémunérer en HSE.Il n’est pas obligé de participer aux réunions de coordination, mais s’il y participe il est en droit de demander à être rémunéré en HSE. Le SNFOLC vous conseille de le demander avant d’effectuer la mission !
SI LA MISSION DU PACTE N’EST PAS ASSURÉE EN ENTIER, SUIS-JE TENU DE LA REMBOURSER ?
OUI
Dans la note de service du 20 juillet 2023 il est bien précisé : « Les missions correspondant à l’engagement ou les alternatives proposées par le signataire de la lettre de mission ne sont pas réalisées du fait d’un refus de l’agent, alors les versements doivent être suspendus voire rappe-
lés pour prendre en compte la réalité du service fait. »
Vous pouvez donc être amené à rembourser une partie de l’argent versé pour le Pacte si vous refusez la transformation de la mission initiale en d’autres missions (stage d’été, école ouverte, etc) ou même de la mission en Pacte RCD.
LA CONTINUITÉ PÉDAGOGIQUE EST-ELLE UNE OBLIGATION POUR LES ENSEIGNANTS ?
NON
La continuité pédagogique est une invention du ministre Blanquer pendant le confinement de 2020 pour faire croire aux enseignants qu’ils seraient tenus d’assurer des cours sans leur fournir les moyens pour le faire et sans respecter leurs horaires de travail. Les élèves étant privés de cours
en présentiel du fait du confinement, le ministère a inventé cette formule pour persuader les enseignants qu’ils étaient redevables des cours qu’ils ne pouvaient assurer. Depuis cette époque, chaque établissement scolaire est censé actualiser à chaque rentrée son plan de continuité pédagogique en cas de « fermeture ou de limitation d’accès aux écoles et établissements ».
Le Pacte porte bien son nom, il est dérogatoire à nos obligations de service et vise à contractualiser une partie de nos missions.
La pression institutionnelle reste forte pour faire accepter ce Pacte. Le danger est réel de vouloir, à terme, l’intégrer dans nos missions pour compenser la pénurie d’enseignants. Le Pacte n’est pas la réponse adaptée au manque de personnels enseignants, de vie scolaire, de santé, d’AESH. Au contraire, il permet au gouvernement de ne pas recruter et de continuer à supprimer des postes.
La meilleure façon de se préserver des dangers du Pacte et d’obtenir les créations de postes c’est de le refuser collectivement et de ne pas céder aux pressions individuelles.
Pour cela, ne restez pas isolé-e, faites appel au SNFOLC.
Initialement prévu pour faire face à une nouvelle épidémie et défini comme un moyen « de maintenir un lien entre l’élève et son (ses) professeur(s) », le concept a été élargi au fait qu’en cas d’absence d’un enseignant, il faudrait garantir aux élèves la présence d’un adulte devant eux.
La continuité pédagogique ne signifie pas faire cours. Or c’est faire cours qui fait partie des obligations statutaires des enseignants. Autrement dit, les rôles sont renversés :
l’obligation de continuité pédagogique s’impose à l’Etat vis-à-vis des élèves et des parents, mais pas aux enseignants.
Le protocole que l’on demande de mettre en place aux personnels vise donc à leur faire définir les règles qu’ils s’imposeraient eux-mêmes au sein de l’établissement alors que rien ne les y oblige. C’est une démarche que le SNFOLC dénonce dans ce qu’elle ouvre la voie à toutes les formes de pression, de culpabilisation voire d’intimidation au quotidien sur les enseignants.
La logique du Pacte est de nous faire basculer d’un système basé sur des missions liées à nos statuts à un système de contrat qui dérogerait aux statuts. Le Pacte, individuel et défini établissement par établissement, permet avec l’accord de l’intéressé de déroger aux limites (missions, obligations, temps de travail) protectrices garanties par le statut.
Le Pacte, matérialisé par une lettre de mission, qui peut être modifiée en cours d’année selon les nécessités de service, est un engagement vis-à-vis du chef d’établissement qui sera seul juge de son accomplissement. Le Pacte est une des pièces maîtresses du plan de liquidation/privatisation qu’a fixé le président Macron pour l’Ecole publique, de la déréglementation qui doit forger « l’école de demain » de Macron, fondée sur l’expérimentation, la territorialisation et la contractualisation.